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Passion Macron (réflexions sur le météore politique)
16 février 2017

Histoire d'un retour en politique grâce à Emmanuel Macron (et Brigitte)

Voici un texte mien écrit en 2002, lu en partie peu de temps après face à une foule rassemblée Place du Ralliement à Angers, et envoyé au Courrier de l'Ouest.

 

 

RASSEMBLEMENT-REFLEXION

 

 Devoir choisir entre Le Pen Président et Jacques Chirac Président est une véritable gageure humaine. Si j’ai à avoir honte ce n’est pas d’être français, mais tout simplement humain.

Si je suis descendu dans la rue ce n’est pas pour contester le choix d’une grande partie des électeurs qui ont voté Le Pen. Ce choix doit être entendu comme un appel au secours face à l’échec des autres partis, face à la menace de la mondialisation, de la politique capitaliste, face à un sentiment d’insécurité grandissante, insécurité qui existe bel et bien mais qui a perdu tout son sens dans une campagne « toute sécuritaire » et qui s’est avéré un excellent terreau au triomphe de l’extrême Droite, ceci exacerbé par les évènements israëlo-palestiniens et leurs répercussions violentes que l’on a vécu sur le terrain français.

Nous vivons dans un monde violent que la violence des médias n’enraye pas mais pérennise et banalise. Est-ce que face à un « Dehors les étrangers ! » par Le Pen ! », nous devons répondre par un « Dehors Le Pen ? » À à une violence, voulons nous répondre par une autre violence ? Jusqu’où ça ira ? Jusqu’à une guerre civile ? J’ai lors d’un voyage récent en Grèce rencontré une grecque qui a connu la guerre 39-45 suivie par une guerre civile. Son enfance, sa jeunesse ont été bousillés. Et pourtant, elle lançait un message d’amour en disant que tous les enfants de la terre étaient ses enfants : « plus jamais ça ! », disait-elle.

J’ai dit que je comprenais le vote d’un grand nombre pour Le Pen. Je comprends aussi toutes celles et tous ceux qui se sont abstenus de voter. Je comprends aussi, manifestants, votre colère qui est aussi la mienne. Mais cette colère ne doit pas nous amener à nous comporter aveuglément. Diaboliser Le Pen est aussi dangereux que de l’angéliser. Je dis cela par expérience personnelle. Je sais ce que c’est d’être enfermé dans quelque chose, en l’occurrence dans un groupe sectaire, et ce que c’est que d’avoir la certitude de détenir la Vérité, au point de refuser tout dialogue, car le prosélytisme auquel j’ai participé dans mon passé est tout sauf du dialogue. Je sais que ce qui rend ces gens encore plus fort, c’est de se sentir persécuté et de le revendiquer ou de le faire sentir. Je sais que ce n’est pas en se confrontant violemment à eux, en disant qu’ils sont dans l’erreur qu’on arrive à changer quoi que ce soit.

Personnellement, je me méfie des mouvements de foule. C’est sur de tels mouvements que le génocide au Ruanda a été ouvertement lancé. J’ai dit que devoir choisir entre Le Pen Président et Jacques Chirac Président est une véritable gageure humaine. Dans devoir choisir entre le pire [j’aurais dû écrire « le plus pire »…] et le moins pire, on est quand même dans le pire. Et, c’est tout simplement humiliant, indigne de l’homme libre que de devoir choisir entre la maladie et la mort. Moi je veux choisir la santé, la vie.

Intimement, je ne me sens pas vraiment politique. Je n’ai pas de réponse toute faite devant la gravité de l’événement. J’en appelle simplement à un dialogue ouvert, plutôt que de s’enfermer dans des partis, j’en appelle à la responsabilité individuelle, à une révolution tranquille, une révolution dans les têtes, pour changer notre vie en profondeur, j’en appelle au réveil des consciences face à notre terre menacée qui n’est d’ailleurs, faut-il le rappeler, pas seulement la terre des humains, mais celle des animaux et des plantes, de la diversité des paysages, des climats, qui font la vraie richesse de notre monde autant que des peuples qui les habitent, et il est de notre devoir, de notre dignité humaine que de revendiquer ces choses simplettes de poète face au « Tout Profit » qui pourri le monde, qui détruit la terre.

Personnellement, j’ai du mal a trouver ma place dans le monde dans lequel je vis, à m’intégrer dans un système dans lequel je ne me reconnais pas. Tous les jours, je me sens obligé de justifier que je ne travaille pas. Tout les jours pour faire, pour construire de la Richesse : le sens m’échappe totalement, sinon celui de faire vivre un système libéral et capitaliste basé sur le profit, un monde matérialiste et individualiste menant à la ruine des âmes – pardon si ce mot paraît de nos jours dérisoire.

Est-il obligé de voter Le Pen pour contester ce monde là ? Sincèrement, je ne crois pas. Mais je ne crois pas non plus qu’il soit obligé de manifester contre Le Pen pour faire entendre la voix de la liberté. Pas, certainement, en affichant « Le Pen dehors ! » qui ne font qu’alimenter les haines et qu’alimenter le feu du Front National. De tels comportements n’incitent pas au respect et au dialogue, mais à une confrontation violente des différents partis.

Il est très regrettable que Jacques Chirac n’ai pas fait signe à Lionel Jospin à l’annonce de sa démission, de minimum de regret, de minimum de soutien, de sympathie et même d’amitié, à croire qu’ils n’ont même pas le point commun d’être tous les deux républicains. Je ne pourrais pas accepter les excuses d’un oubli de sa part que par ailleurs Jean-Marie Le Pen a bien su exploiter en félicitant la dignité de Lionel Jospin. Mais dans l’immédiat, pour sauver la République et la Démocratie, il n’y a d’autre solution raisonnable, je crois, que de voter pour Jacques Chirac au second tour. Malgré la peine que ça nous fait, et même l’indignation et la colère que ça provoque en nous, ce choix est nécessaire. Malgré les erreurs que nous avons pu faire lors de cette élection, gardons la tête haute, tirons des leçons et transformons ce qui paraît négatif aujourd’hui en positif pour demain : désormais, nous savons que le Front National n’est pas mort, qu’il n’a jamais été aussi bien portant dans notre pays et qu’il représente un réel danger contre lequel il faut lutter pacifiquement, mais fermement et sérieusement. On ne peut plus ironiser sur un tel sujet. Je demande à celles et à ceux qui ont voté de manière contestataire pour Jean-Marie Le Pen, et ils le sont, je crois, nombreux, de bien réfléchir à la portée de leurs prochains votes, pour ne pas détruire ce que Lionel Jospin a dans le labeur et l’imperfection, mais dans une réelle bonne volonté construit pour nous, pour ne pas, surtout, faire disparaître la République qui, malgré ses imperfections et les insatisfactions qu’elle porte en elle, vaut mieux qu’un régime totalitaire, malgré ses apparences. Jean-Marie Le Pen a eu l’habilité et le culot de récupérer la confusion et la division du peuple en déclarant qu’il était « socialement de gauche, économiquement de droite, et nationalement de France. » Qui ne voit pas là une stratégie de dernière minute pour s’attirer le peuple . Dites-moi quand avez-vous entendu cette formule séduisante de Jean-Marie Le Pen, sinon le jour où il a senti qu’elle lui serait favorable ? Et sur ce point, Jacques Chirac a eu raison de refuser de rencontrer Jean-Marie Le Pen, parce que le Front National n’est pas un parti démocratique et qu’il est, par essence, une imposture et une atteinte aux libertés fondamentales dont celle de l’Expression dans les limites fixées par la loi. Aussi, parce que cet homme au charisme extraordinaire, reconnaissons-le, est un homme qui fait appel à la démocratie quand ça le sert : alors que la démocratie a ses limites, il s’évertue habilement à les transgresser tout en accusant subtilement ses défenseurs de n’être pas démocrates si on lui refuse un face à face. Enfin, parce que cet homme terriblement efficace dans l’art de charmer, de parler, de faire tourner à son avantage toutes les situations, s’y étant depuis longtemps préparé, est par nature très déstabilisant, dangereux, car c’est un mur, malgré ce qu’il tente de nous faire croire, et il y réussit très bien : que c’est un homme de dialogue, un homme ouvert.

Il est plus facile et aussi plus dangereux de toucher la corde sensible des gens, et de conquérir les cœurs par un discours démagogique et enflammé, que de parler sans grands éclats de voix et pousser les gens à la réflexion, capacité qui distingue l’homme de ses amis les animaux. Moi-même, j’ai dû par trois fois remanier mon texte, parce que des fois, notre cœur a ses raisons qui nous éloigne de la raison. Pour moi, Jacques Chirac n’a pas un discours plus convaincant que Jean-Marie Le Pen, mais il s’agit, je le répète, de sauver avant tout la Démocratie, qui est un bien précieux. Que toutes celles et tous ceux qui seraient tentés de s’abstenir de voter ou de voter blanc réfléchissent bien à cela. Que les jeunes qui sont tentés pour ne pas prendre cette grande responsabilité, y réfléchissent à dix fois. Le but est d'atteindre au moins 80% de voix pour la Démocratie, pour la République, en votant pour Jacques Chirac président, afin de prouver à Jean-Marie Le Pen que ses idées et sa politique fascistes ne sont pas les bienvenues pour la majorité des français. « La résignation n’est pas écrite sur la pierre de sommeil », disait André Breton ; je pense à Victor Hugo, Gandhi, à Martin Luther King, à Nelson Mandela, à Bob Marley et tant d’autres qui ont lutté chacun à leur manière, pacifiquement, qui ont lancé des messages de foi, qui ont lancé des défis à relever. Relevons le défi, même si c’est dur, très dur. Et que plutôt que de manifester contre Le Pen, on fasse un grand rassemblement. Je crois qu’une action efficace ne peut se faire que sur une réflexion solide, et c’est de cette réflexion là dont nous prive Jean-Marie Le Pen pour être crédible vis à vis du peuple dans sa majorité. Il serait positif, je pense, que cette place du Ralliement devienne le lieu du rassemblement et de la réflexion populaire, un espace d’échange, de parole, de façon régulière et permanente. Il est grand temps qu’on puisse pouvoir régulièrement s’exprimer en public, dans le respect et la dignité bien sûr, mais de laisser place et libre cours à la parole qui est libératrice et nécessaire à la santé du peuple. La parole en public ne doit plus être le privilège de quelques politiciens, il doit être le privilège de toutes et de tous. Or aujourd’hui, trop accaparés par nos affaires, trop noyés et grisés par le travail, nous ne parlons plus. Il est grand temps que ça change.

Pour conclure, j’aimerais, si vous le voulez bien, lire un petit poème sur lequel je suis tombé et qui a eu une résonance particulière en moi, qui je crois amène sur un terrain de réflexion. Il est du poète indien Rabindrananth Tagore. Le Voici :

 

Pourquoi la lampe s’est-elle éteinte ?

Je l’entourai de mon manteau pour la mettre à l’abri du vent ; c’est pour cela que la lampe s’est éteinte.

 

Pourquoi la fleur s’est-elle fanée ?

Je la pressai contre mon cœur avec inquiétude et amour ; voilà pourquoi la fleur s’est fanée.

 

Pourquoi la rivière s’est-elle tarie ? Je mis une digue à travers d’elle afin qu’elle me servit qu’à moi seul ; voilà pourquoi la rivière s’est tarie.

 

Pourquoi la corde de la harpe s’est-elle cassée ?

J’essayai de donner une note trop haute pour son clavier ; voilà pourquoi la corde de la harpe s’est cassée.

 

Rabindranath Tagore, poète indien, dans Le Jardinier (1913, poème LII)

 

Merci de votre écoute.

 

Article du Courrier de l'Ouest citant des extraits de Rassemblement-Réflexion

 

Article de presse élections Chirac-Le Pen extrait de mon texte Rassemblement-Réflexion élections 2002 Courrier de l'Ouest

 

Lettre au Courrier de l'Ouest, le 3 mai 2002

 

Madame, Monsieur,

 

J’aimerais manifester ma colère et mon incompréhension par la présente, suite à la publication très partielle, dans le Courrier de l’Ouest du samedi 27 avril 2002, du courrier que je vous avais envoyé.

Premièrement, il me semble que vous vous êtes mépris grandement sur la nature de celui-ci. Il s’agissait, je l’avais noté derrière l’enveloppe, d’un « courrier d’électeur » et non pas un « courrier de lecteur » auquel il a été réduit.

Deuxièmement, il me semble que vous vous êtes mépris grandement sur le sens et la portée de celui-ci. Ce texte, j’y ai travaillé pendant quatre jours, et le voilà réduit à quelques extraits bien pensants, et qui ont déformé à tel point mon message, mes messages, devrais-je dire, qu’on avait l’impression, en le lisant, que c’était l’expression d’un « pur socialo »*. Vous dites dans l’encadré intitulé « Un grand débat » dans le Courrier de l’Ouest du vendredi 3 mai 2002, que vous avez publiez des lettres « leurs extraits les plus significatifs ». Pour ma part, rien sur la diabolisation de Le Pen, rien sur l’appel au dialogue et à ne pas s’enfermer dans des partis, rien sur l’appel au calme des esprits lors des manifestations, et j’en passe !

Troisièmement, vous avez fait ça à la va vite sans me consulter aucunement avant votre publication.

Que pensez-vous de ce que j’en pense ? Quelles analyses pensez-vous que j’en ai, quelles conclusions j’en tire ?

Premièrement, vous ne publiez que ce qui vous arrange, et plus, ce qui vous ne dérange pas. C’est sûr que de savoir que des gens ne se retrouvent pas dans la société actuelle et que cela soit exprimé, c’est politiquement pas correct… que des gens ne « travaillent » pas, sans pour autant être des paumés, ça bouleverse les conventions…

Deuxièmement, vous vous jugez au-dessus des autres, au-dessus de vos lecteurs, au-dessus de moi-même pour décider ce qui est important et ce qui ne l’est pas, puis de l’imposer. En somme vous faites un travail de démagogues en vous abaissant au public, en ne publiant que ce qu’il attend, que ce qu’il a envie de lire, de savoir. Pourquoi ? Pour ne pas perdre de la clientèle ? C’est grave. Voilà à quoi est réduit la parole démocratique. A l’heure que nous vivons, c’est honteux. C’est par une telle attitude des médias, entres autres, que les idées de Le Pen ont pu se faire un creuset et que les consciences se sont endormies sur la gravité de la présence de l’extrême droite en France. Loin de moi de vous accuser de la situation actuelle : c’est à vous, aux médias en général, qu’il revient de faire un examen de conscience et de changer votre façon de traiter les choses.

Troisièmement, peut-être cela vous dérangeait-il que soit révélé le talent d’un écrivain inconnu autrement que par l’édition traditionnelle. Je vous rassure, je ne me crois pas pour Quelqu’un et je n’ai ni écrit, ni envoyé mon texte dans un tel but, mais par un réel sentiment du devoir, ou si vous préférez, un réel sens des responsabilités après le choc que j’ai eu.

Lorsque j’ai appris que j’avais été publié, je croyais vraiment que mon texte avait apparu entièrement. J’avais confiance. Je me disais qu’un texte de cette valeur méritait, dans des circonstances exceptionnelles, une édition exceptionnelle. Naïveté de ma part… J’ai appris ce qu’il en était réellement. Triste sort. Il serait facile d’en accuser la longueur. J’estime que vous aviez les moyens de le publier sur une page, d’autant que dans l’édition du jeudi 2 mai 2002, vous avez repris à bon compte des idées qui se trouvaient dans mon texte à moindre longueur, et qu’apparemment cela ne vous dérange pas non plus de publier des textes poétiques (dernière page du même numéro) : le poème de Tagore que j’avais cité était exemplaire et pertinent. Dommage !

Conclusion : devrais-je m’estimer heureux, avoir de la chance, ou même, me sentir redevable ? Après tout, j’ai été publié… Oui, mais pas entendu comme il se devait. J’aurais préféré ne pas être publié du tout que dans ces conditions.

 

Respectueusement, mais avec toute la non considération que je vous dois.

 

Stéphane Gentilhomme

 

 

Réponse du Courrier de l'Ouest, le 7 mai 2002

 

 

 

 

 

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Commentaires
Passion Macron (réflexions sur le météore politique)
  • Mise en lumière et perspective de deux lumières : Emmanuel Macron et sa femme Brigitte. Autiste Asperger, je tente avec ma propre perception de montrer pourquoi Emmanuel Macron est l'homme dont la France, l'Europe et le monde à besoin.
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